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A Aubervilliers, un square au sol pollué par le plomb – Grand Paris Popu

A Aubervilliers, un square au sol pollué par le plomb

Le square Stalingrad est fermé au public depuis le 22 novembre. En cause, des traces de plomb retrouvées dans la terre, dont la concentration est supérieure aux recommandations des autorités de santé.

Les travaux de réaménagement et de végétalisation commencent dans le square Stalingrad. © Mahault Meunissier

Grilles cadenassées, terre retournée, jeux d’enfants déserts, le square Stalingrad n’est plus le repère qu’il a longtemps été pour les familles albertivillariennes. L’explication de sa fermeture depuis fin novembre tient en une courte phrase inscrite sur un panneau cloué à la grille : « Amélioration de la qualité des sols suite à des traces de pollution ». 

« Nous avons retrouvé des traces de pollution aux métaux comme il y en a beaucoup sur le territoire de la Plaine Saint-Denis », explique une responsable de Plaine Commune, l’établissement public territorial chargé notamment de la gestion des espaces verts de sept villes de Seine-Saint-Denis. Des analyses du sol du square Stalingrad ont été réalisées le 4 juillet 2024. Les résultats, reçus un mois plus tard, font état de quantités de polluants supérieures aux recommandations du Haut conseil de la santé publique (HCSP). Parmi ces substances, on retrouve notamment le plomb. 

D’après Plaine Commune, la teneur en plomb de la majorité des échantillons dépasse le seuil recommandé par le HCSP, soit 300 mg/kg. « De telles quantités peuvent être néfastes pour la santé d’un jeune enfant, indique la porte-parole. Mais il faudrait ingérer une quantité importante de terre pour que cela soit dangereux. Il peut arriver que les jeunes enfants mangent de la terre, mais pas dans des quantités suffisantes a priori. »

Plaine Commune se veut rassurante. L’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France n’a d’ailleurs pas demandé de dépistage de l’intoxication au plomb chez les habitants d’Aubervilliers. Elle l’avait pourtant demandé à la suite de l’incendie de la cathédrale de Notre-Dame de Paris qui a disséminé du plomb dans les quartiers environnants. Dans un rapport de 2019, l’ARS estimait qu’un seuil de 300 mg/kg de plomb dans les sols devait « conduire à un dépistage dans la population des enfants de moins de 7 ans et chez les femmes enceintes ou envisageant une grossesse dans les 6 mois ». Interrogée à ce sujet, l’ARS n’a pas répondu à la sollicitation de Grand Paris Popu.

« C’est dangereux de laisser un jardin ouvert alors qu’on sait que la zone est potentiellement polluée »

Soumia Achfaa, ancienne secrétaire générale du Parti radical de gauche 93 et Albertivillarienne

La première phase de résultats d’analyses des sols du square Stalingrad est tombée le 6 août. Des prélèvements complémentaires ont ensuite été réalisés, ce qui a ralenti la fermeture du square, effective ce 22 novembre. Un intervalle que déplore l’ancienne secrétaire générale du Parti radical de gauche 93 et habitante d’Aubervilliers, Soumia Achfaa. « Je reproche à la mairie son manque de réactivité s’agissant de la fermeture du square, critique-t-elle. Pendant la période estivale, il y a énormément de familles et donc d’enfants. » La mairie d’Aubervilliers, a qui revient la compétence de fermer les parcs, n’a pas répondu à notre demande d’interview.

« C’est dangereux de laisser un jardin ouvert alors qu’on sait depuis un moment que la zone est potentiellement polluée », poursuit Soumia Achfaa, en référence à la crèche Yvette Lundy, adjacente au square. En juillet 2024, la structure a fermé l’accès des enfants aux espaces extérieurs pour cause de pollution au plomb. Des travaux de dépollution devaient être entrepris, mais la crèche a depuis fermé pour « manque de personnel », explique le département Saint-Denis, en charge de l’établissement. La présence de plomb dans les sols de la crèche était connue des pouvoirs publics. Un rapport du ministère de la Transition écologique publié en 2021 fait état d’investigations menées en 2016 à Aubervilliers. Elles ont permis de trouver la présence de plomb sur la zone de la crèche Yvette Lundy. Le rapport préconisait des mesures de restriction, notant « la présence de plomb dans les sols superficiels à des teneurs supérieures à la valeur de référence définie par le HCSP ».

Un mauvais souvenir du passé industriel

La pollution au plomb est symptomatique des villes au passé industriel. « Dans le square Stalingrad, se trouvait le dépôt des tramways », constate Didier Hernoux, président de la Société de l’histoire et de la vie à Aubervilliers. Ce dépôt est visible sur les plans d’archives de la ville entre 1880 et 1912. Il disparaît en 1940. D’après un bénévole de l’association, « il se pourrait que le plomb vienne de là. Le dépôt remettait les tramways en état et se chargeait sûrement de réparer les batteries. » Des anciennes photographies de la ville montrent une grande cheminée reliée au toit du dépôt de tramways. « Cela signifie qu’il y avait une combustion qui nécessitait l’évacuation de vapeur ou de fumée », ajoute une des bénévoles de l’association, même si l’origine de la présence du plomb reste inconnue.

Archives municipales des plans du square Satlingrad en 1912 © Archives de la ville d’Aubervilliers

Qu’il soit lié ou non au dépôt des tramways, le plomb aura en tout cas pollué les sols de la zone autour du square Stalingrad. Soumia Achfaa en a trouvé des traces dans la résidence neuve dans laquelle elle a emménagé en 2022. « Avec mes voisins, nous nous sommes interrogés, car dans nos contrats, les promoteurs précisaient de ne pas planter de légumes, d’arbres fruitiers, et de plantes comestibles », raconte-t-elle alors que sa résidence se situe dans une rue attenante au square.

Un doute qui pousse les résidents à solliciter l’avis d’un expert, l’entreprise Biomede, spécialisée dans le diagnostic des sols et de la dépollution des terres agricoles. Dans son rapport effectué en 2023, Biomede relève un taux de plomb de 122 parties par million. Le seuil fixé par l’Association française de normalisation, organisme sous tutelle du ministère chargé de l’Industrie, est de 100 ppm. Preuve que le plomb a pollué les sols au-delà du seul square Stalingrad.

Mahault Meunissier