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École française des femmes de Nanterre : une revanche par la sororité – Grand Paris Popu

École française des femmes de Nanterre : une revanche par la sororité

Dans cette structure, des femmes originaires du monde entier réécrivent leur avenir. Entre apprentissage du français, insertion professionnelle et soutien mutuel, la sororité devient leur moteur et leur revanche sur un passé souvent difficile.

ll est 9h30. Les premiers rayons du soleil traversent les vitres et viennent danser sur les tableaux accrochés au mur. Simone de Beauvoir, Marion Cotillard, Laura Flessel, Marie Curie… Des portraits inspirants semblent veiller sur la salle de classe de l’École française des femmes de Nanterre, qui s’anime peu à peu. Un souffle d’énergie s’installe alors que les élèves arrivent au gré des rires. Parmi elles, Fatima-Zohra, Viktoriia, Rajini, Ana et Fitma, venues d’Algérie, d’Ukraine, d’Inde, du Brésil ou du Maroc.

Ce lundi 16 décembre, elles participent à leur premier cours de français de la semaine, niveau intermédiaire. L’exercice du jour : décrire une photo de famille. Chacune leur tour, elles lisent à voix haute leur description, alors qu’Alain, leur professeur, vérifie l’orthographe à l’écrit. Si pour certaines, l’oral est une étape maîtrisée, l’écriture reste un défi de taille. Beaucoup n’ont jamais eu la chance d’aller à l’école. Plus qu’un lieu d’apprentissage, l’École française des femmes est une véritable bouffée d’oxygène, loin des tâches quotidiennes du foyer. C’est mon moment à moi. Le reste du temps, je me consacre à l’éducation de mes enfants, explique Anan, 28 ans, maman marocaine de deux filles. Ici, il y a une bonne ambiance qui me motive à progresser”. Elle espère, grâce à ses efforts, obtenir la nationalité française.

Favoriser l’autonomie professionnelle

Inauguré en 2022 par Patrick Jarry, alors maire de la ville, le lieu propose des cours de français du niveau A1 à C1. À l’issue de leur formation, les élèves ont la possibilité de passer le Diplôme d’études en langue française (DELF), délivré par le ministère de l’Éducation nationale. Pour compléter l’apprentissage de la langue, ces femmes de tous horizons participent également à des ateliers thématiques sur la santé, la citoyenneté, la parentalité et la vie quotidienne.

Certaines choisissent même la FLE pro (française langue étrangère professionnelle), une option de deux heures par semaine qui les initie au monde de l’entreprise et favorise l’autonomie professionnelle. L’objectif principal de l’école ? Leur donner les moyens de s’insérer durablement dans la société : “Elles ne peuvent pas trouver un travail sans un bon niveau de français, c’est illusoire, explique Virginie Autier, coordinatrice. France Travail m’envoie souvent des femmes car ils ne peuvent rien faire pour elles.”

Il est 14h. Fatiha, Zineb, Zara et Maribel, âgées de 35 à 45 ans, se retrouvent tout sourire pour leur cours de FLE pro. Au programme, atelier CV et podcast sur les freins à l’insertion professionnelle. Ces obstacles, elles les connaissent bien. Fatiha se souvient de son arrivée en France en 2015. Enceinte de son premier enfant, elle ne parlait pas un mot de français : “Je ne pouvais pas communiquer avec les médecins. Ça m’a énormément affectée.” Au Maroc, elle était diplômée en gestion des entreprises, mais ici, elle a dû se contenter d’un travail de conductrice accompagnatrice.

Pour Maribel, arrivée du Mexique avec un équivalent de bac +4 en biochimie, les débuts ont été tout aussi brutaux. “Quand j’ai cherché du travail, on m’a proposé de nettoyer les toilettes. J’aspirais à tellement plus”, se désole-t-elle, tout en listant ses compétences dans son livret de projet professionnel. Ces épreuves ont non seulement miné leur estime de soi, mais ont aussi alimenté les commentaires dévalorisants auxquels elles ont dû faire face. “On nous a souvent dit qu’on ne serait pas capables de parler français, mais ça donne de la force pour se battre”, affirme Zineb, posant une main réconfortante sur celle de Maribel.

La sororité comme moteur

Aujourd’hui, ces femmes considèrent l’école comme leur revanche. Tandis que Fatiha a récemment décroché la nationalité française grâce à son niveau B1, Zineb, elle, a obtenu un CDI dans une blanchisserie. Le graal, pour Virginie : “C’est la sororité qui les pousse vers le haut. Elles arrivent souvent recroquevillées et repartent avec le sourire. On ne peut pas me faire de meilleur cadeau”, se réjouit la coordinatrice, qui anime également des séances de sophrologie afin de les aider à gérer leur stress et renforcer leur confiance en elles. « Avant on n’osait même pas dire qu’on ne comprenait pas quand on nous parlait français à la boulangerie ou à l’école. Maintenant, on n’a plus peur », assure Fatiha. Malgré un parcours semé d’embûches, elles continuent de rêver.

De son côté, Zara, enseignante en mathématiques dans son pays d’origine, lutte pour retrouver ce métier en France. Le port du voile complique ses démarches. “Ici, on peut le porter sans problème, et c’est une immense chance”, confie-t-elle, suscitant un hochement de tête de la part de ses camarades, voilées ou non. Pour toutes, l’école demeure un lieu d’espoir et d’émancipation. Cette année, 73 femmes sont inscrites, et si toutes ne passent pas le diplôme à la fin de l’année, 100 % des participantes le décrochent.

Anna Hersin