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Omar Graine, la voix enflammé des travailleurs à l’incinérateur – Grand Paris Popu

Omar Graine, la voix enflammé des travailleurs à l’incinérateur

Entre les mauvaises odeurs et les horaires décalés, les conditions de travail sont difficiles à l’incinérateur de déchets d’Ivry-sur-Seine. Omar Graine est devenu délégué syndical pour défendre les droits des salariés face à la direction. Un combat qui lui tient à cœur. 

Omar Graine à son bureau, dans les locaux de l’incinérateur de déchets d’Ivry-sur-Seine.  ©Léonie Cadon

«J’les ai rendu fous !» Omar Graine entre en fanfare dans le bureau de la CGT. Il commente avec fierté la réunion qu’il vient d’avoir avec la direction. Ils ont discuté des mesures de sécurité à prendre, après un accident du travail. Le quinquagénaire est délégué syndical à temps plein à l’incinérateur de déchets d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) depuis deux ans. Il s’installe sur sa chaise de bureau grinçante pour regarder ses messages. Avant de se lever pour faire couler un café. Le syndicaliste ne tient pas en place. 

Quand c’est nécessaire, il n’hésite pas à avoir des discussions musclés avec les responsables. «Je mets des bâtons dans les roues des Ressources humaines, qui reçoivent des pressions de la direction pour faire appliquer leur stratégie, explique-t-il. Donc on passe par un rapport de force.» Omar Graine estime que la stratégie de l’entreprise ne prend pas en compte le bien-être des travailleurs. Aujourd’hui, l’usine compte 75 salariés, contre 140 il y a quelques années. «Les équipes vont passer de sept à quatre. Officiellement parce que les besoin s’amoindrissent. Je pense que c’est pour des raisons budgétaires, critique-t-il. C’est trop peu, ça met en danger les travailleurs.» Pour avoir plus de poids lors des négociations, il s’informe pour «bloquer les employeurs sur le droit». Derrière lui, sur l’étagère, trône un énorme code du travail.

Quand la diplomatie n’aboutit pas, c’est l’épreuve de force. Une dizaine de jours plus tôt, le syndicat a déposé un préavis de grève. Il demandait un départ à la retraite anticipé pour les ouvriers les plus exposés aux produits nocifs. L’ancien ouvrier, instrumentaliste-automaticien en charge de la manutention, estime que depuis les ordonnances Macron de 2017, les droits des travailleurs sont remis en cause. Il martèle qu’il se bat par conviction, «pour la société, pour nos enfants.»

Travailler sans épée de Damoclès

Omar Graine est particulièrement attaché à la sécurité de ses collègues. Les conditions de travail sont rudes dans le plus vieil incinérateur de France : fumées nocives, odeur constante des déchets, rythme de travail irrégulier. Le bruit des machines se mêle à celui des mouches dans le bureau qui donne sur l’usine. Omar Graine, également secrétaire du comité social et économique (CSE), a défendu la mise en place d’une enquête sur les risques psychosociaux. Il se bat également pour les retraites ou contre le mauvais management. «Je veux faire en sorte que les ouvriers puissent travailler dans de bonnes conditions, sans épée de Damoclès au-dessus de leur tête», affirme-t-il.

L’élu se voit surtout comme un porte-parole des salariés. Il a du mal à parler de lui, et ramène les mérites au collectif. Son «camarade David» le juge trop modeste. Représentant du personnel depuis deux ans, David de Olivera estime que son collègue «porte la lumière sur ce que la direction essaye de cacher.»

Se syndiquer pour dire ce qu’on pense

Omar Graine s’engage pour la première fois en 2011 au sein du comité d’entreprise de l’incinérateur. Déjà pour défendre le statut des salariés, après un rachat de l’entreprise. En 2015, il prend un poste à EDF. Il dit être soumis à des pressions pour ne pas dénoncer des dysfonctionnement. «L’honnêteté ne paye pas auprès d’eux», accuse-t-il. Omar Graine s’engage dans un mandat pour pouvoir se défendre sans être inquiété. En 2022, l’ouvrier est rappelé par la CGT pour devenir délégué syndical. Il est élu pour trois ans.

Omar Graine habite toujours dans le Nord, dont il est originaire. Il fait régulièrement le trajet jusqu’à Ivry et dort à l’hôtel. Le syndicaliste admet que son travail déborde parfois sur sa vie personnelle. Pendant la grève de protestation contre la réforme des retraites en 2023, il a passé trois semaines non-stop à l’usine. 

Ce qui nourrit sa motivation, ce sont les relations humaines, même si elles ne sont pas toujours simple. Avec les travailleurs, il doit parfois faire preuve de diplomatie. «Il faut mettre en confiance, discuter, s’adapter», énumère-t-il. Un travail énergivore, d’autant les ouvriers ne font pas toujours preuve de solidarité. «Il faut demander des avantages individuels pour pousser certains à s’engager et défendre les droits collectifs,» râle-t-il.

Omar Graine espère ne pas se faire licencier avant la fin de son mandat, dans un an. «Ils ont déjà essayé !» se moque-t-il. Il suit en parallèle un master de Ressources humaines. Le délégué syndical pourrait passer de l’autre côté du bureau. 

Léonie Cadon