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Abigaïl Konan, l’enfant de chœur devenue rappeuse – Grand Paris Popu

Abigaïl Konan, l’enfant de chœur devenue rappeuse

Abigaïl Konan, alias Bogota, s’installe doucement dans la scène hip hop du 93. A 24 ans, elle s’est déjà créé une notoriété à Aubervilliers et sort prochainement un collaboration avec la rappeuse albertivillarienne Shayne.

La rappeuse Abigaïl Konan, alias Bogota, trois fois invitée en concert aux Laboratoires d’Aubervilliers. © Mahault Meunissier

«Thé au citron, ou thé vert ?», s’interroge Abigaïl Konan en regardant les sachets que lui propose la serveuse de L’Entracte, une brasserie au coin de l’avenue de la République d’Aubervilliers. Originaire de Créteil, Abigaïl Konan a une attache spéciale à la ville. «C’est ici que j’ai fait ma première scène. C’était un concert organisé par l’association Les Laboratoires d’Aubervilliers, c’est sur une rue perpendiculaire à l’avenue de la République», raconte Abigaïl Konan.

En 2021, l’artiste commence à poster des vidéos de ses textes rappés. À la fin de l’été, Les Laboratoires d’Aubervilliers, lieu dédié à la création artistique, la contactent pour être à l’affiche d’un de leurs concerts. C’est le début de sa carrière artistique. «Je n’ai jamais vécu de moment aussi stressant de toute ma vie, explique la jeune femme. Je tremblais jusqu’au moment de monter sur scène. Mais j’y suis allée, j’ai commencé à faire ce que j’aime. Le public a été très réceptif et ça a été pour moi le signe que j’étais vraiment née pour ça.» Ce premier souvenir, la rappeuse le garde gravé dans son cœur. «À cette période-là, je cherchais un signe de Dieu. C’est Aubervilliers qui a vu la lumière en moi», ajoute la jeune femme qui entretient un lien fort avec la religion. 

Des louanges au rap 

Abigaïl Konan est bercée dans son enfance par les louanges et la musique cantique. «Mon père est pasteur, je suis née entourée de musique», précise-t-elle. C’est à l’âge de huit ans qu’elle commence ses compositions musicales. «J’ai voulu un piano parce que ma cousine y jouait et je voulais faire pareil. Alors, j’ai fini par avoir un piano et je ne me suis plus arrêtée d’en faire», se remémore-t-elle. Sa passion pour cet instrument sonne comme une évidence pour la jeune Abigaïl, qui est alors persuadée de vouloir faire de la musique son métier. «J’enchaînais les leçons et les séminaires de piano. À côté de cela, je chantais à l’église, mais je ne savais pas encore que j’avais une voix», explique-t-elle. 

La découverte du rap ne se fait que plus tard, à l’adolescence. Dernière de la famille, ses aînés lui font découvrir le hip hop, mais aussi l’artiste qui deviendra un de ses modèles : Booba. «Mon pseudonyme Bogota, c’est une référence au titre Daniel Sam. J’étais fan de ce son, il y a un moment où Booba dit “Booba Bogota”. Ça sonnait comme une collaboration, donc j’ai décidé qu’on m’appellerait comme ça», détaille Abigaïl Konan qui révèle pour autant n’avoir aucune origine colombienne. 

Le répertoire musical de la rappeuse ne se cantonne pas qu’au hip hop. Sa chanson préférée ? Tous les cris des SOS de Daniel Balavoine. «Je suis une grande fan de variété française, je tiens cela de mes parents, dit-elle en souriant. J’adore Dalida, Aznavour et la grande Edith Piaf. En plus d’être des artistes accomplis, ce sont des gens qui sont venus d’en bas et qui ont tout pris. C’est une inspiration pour moi.» 

Son premier « seize », texte rappé composé de seize mesures, Abigaïl l’écrit à 17 ans. «Avec mon groupe de copines, on trouvait que le rap français manquait de figures féminines. Aux US, ils avaient Cardi B. Nous, depuis Diam’s, on n’avait plus personne. Alors on s’est mise en tête de se voir deux jours plus tard avec un texte écrit». Le délai passé, Abigaïl est la seule à avoir noirci une page. «J’ai commencé à rapper et tout le monde s’est tu. Quand j’ai terminé, mes copines m’ont forcé à continuer parce qu’elles pensaient que j’avais quelque chose», se souvient-elle. Sa famille est également un soutien pour la jeune femme. «Ma mère est fan de ce que je fais, mes frères aussi sont derrière moi. Il n’y a que mon père qui n’apprécie pas mon choix de carrière parce que rap est religion, ce n’est pas forcément évident…»

«Je me suis longtemps sentie coupable vis-à-vis de la religion» 

«Beaucoup de bonnes choses me sont arrivées quand je m’en remettais à Dieu», assure la rappeuse en racontant sa rencontre avec sa styliste. La spiritualité, c’est un sujet très important pour Bogota, qui s’en était pourtant éloignée un temps. «Je me suis longtemps sentie coupable vis-à-vis de la religion parce que j’étais une adolescente rebelle, mais aussi à cause de ce que je disais dans ma musique. Alors maintenant, j’essaye de parler de Dieu dans mes textes. Mais je ne parle pas d’une religion en particulier parce que je m’adresse à tous les croyants», précise-t-elle. Pour la rappeuse, il est primordial que sa musique n’exclue personne. 

Lorsqu’elle débute dans le rap, Bogota rappe uniquement sur de la trap [un sous-genre du hip hop caractérisé par des bpm élevés et une instrumentale électronique] et écrit des textes plus sombres. «J’avais le style qui allait avec, je mettais uniquement des joggings et je faisais garçon manqué. Maintenant que j’ai gagné en maturité, je fais plus attention à mon image, ça se ressent aussi dans ma musique que je veux plus portée sur les sentiments», témoigne Abigaïl Konan.

Un travail sur elle-même et sur sa musique qui semble payer. «Il y a cinq ans, je voyais les autres rappeuses comme des concurrentes. J’ai totalement changé d’avis. En ce moment, je travaille sur des projets avec deux artistes que j’ai rencontrées lors de ma première scène aux Laboratoires», raconte-t-elle. En préparation: une collaboration avec la rappeuse d’Aubervilliers, Shayne. Ces rencontres permettent à la jeune artiste de se rapprocher de professionnels de la musique, comme du label albertivillarien, C4 Industrie. Mais pour l’instant Abigaïl tient à son indépendance qui lui permet de vivre sa passion «avec le cœur», même si pour cela elle doit enchaîner les petits boulots. «Tous les jours, j’ai une nouvelle casquette. Animatrice, assistante dans un cabinet dentaire, figurante… J’ai essayé tout ce qui était possible», sourit-elle. Si Bogota assure ne pas souffrir de cette situation, dans cinq ans, la rappeuse espère pouvoir vivre pleinement de son art.

Mahault Meunissier